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 Samadhi Bouddha Statue - Anuradhapura - Sri Lanka  IV-Ve Siècle

ARTICLES

Une théorie bouddhique de la loi internationale

Par Dr.H.S.S.Nissanka.

 

 

 

En 1967, à l'académie de droit international à La Haye, le professeur K.N. Jayathilleke a donné cinq conférences sous le titre  « les principes du droit international dans la doctrine bouddhique ». Ce que je propose dans cet article  n'est pas de soumettre à une analyse critique les traités du Dr. Jayathilleke, mais de trouver ce qu’il vise par « une théorie bouddhique de droit international et de politique internationale ». Ces conférences à La Haye ont été publiées dans « Recueil des cours »vol.3 1967. Les références aux pages dans le présent article correspondent à la numérotation dans le « Recueil » sus mentionné.

 

            Dans le strict sens du mot, il n'y a pas «  loi bouddhique », mais une influence de l'éthique bouddhique et des changements que celle-ci a laissés sur les coutumes. Il n'est point question d'une autorité bouddhique qui ait jamais créée ou promulgué quelle que loi que ce soit. Le professeur Jayathilleke a commencé sa première conférence par une allusion au texte précité extrait de : « Encyclopedia of Religion and Ethics ». Et il poursuit : «Je tiens à signaler, au contraire, le code monastique consiste en des lois estimées jusqu'à nos jours comme règles exécutoires de conduite précises et codifiées, entraînant des poursuites judiciaires en cas d'infraction.

 

            Le professeur Jayathilleke a fondé son argument sur sa méthode habituelle de recherche mettant en lumière de nombreux éléments de base aussi bien principaux que secondaires, disponibles pour lui. Pour comprendre son traité à ce sujet, il convient de considérer précisément l’expression «droit international »

 

Celle-ci se rattache à un corps de lois et traditions qui ont connu une croissance dés le XVI siècle dans l'Europe de l'Ouest. Une autorité dans le droit international, L. Oppenheimer a fait l'observation suivante : « le droit international selon l'interprétation moderne du terme, n'a pas existé dans l'Antiquité ni dans la première partie du Moyen Âge. Il est initialement produit de la civilisation chrétienne, et s'est propagé dès la deuxième moitié du Moyen Âge. »

 

La citation ci-dessus soutient le point de vue selon lequel le droit international a connu son essor aux arts de la civilisation chrétienne, nourrie par l'éthique chrétienne. L'expression « droit international » a été d'abord forgée par Jeremy Benthom en 1780. Selon les définitions du droit international, acceptées en général par les juristes occidentaux, c’est un corps de lois qui détermine les conduites des états civilisés dans leurs relations entre eux. À une certaine période de l'histoire, il y avait une croyance commune en l'Occident selon laquelle les états de l'Est ne sont pas civilisés. Cependant, certain occidentaux semblent être convaincus que l'Orient est dépourvu de tout ce que l'on appelle « droit international ». Il y a un certain nombre d'Etats souverains d’Asie qui entretiennent des relations diplomatiques mutuellement, et leurs affaires extérieures sont dirigées par des lois fondées sur les principes bouddhiques qui conviennent à tous les temps et toutes les latitudes. Sur une preuve comme celle des édits de l'empereur Açoka, le professeur Jayathilleke a basé son argument sur ce que les états asiatiques entretiennent des relations diplomatiques non seulement avec des états souverains d’Asie, mais aussi avec d'autres d’Europe de l'Est, du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. L’empereur Açoka a établi des relations diplomatiques avec cinq rois grecs ainsi qu'avec les gouverneurs de Chola, du Sri Lanka et de Pandayan (p.556). Le professeur Jayathilleke fait allusion à un ambassadeur envoyé du Sri Lanka à Rome sujet duquel Pliny sur qui se trouvait à Rome à l'époque du règne de l'empereur Claudius.

 

            En se référant aux philosophies politiques Kautilianes et machiavéliques, le Pr. Jayathilleke fait la remarque suivante : « il est évident dans ce travail que tous les aspects de ces valeurs morales renforçaient au maximum toutes les capacités et aptitudes. La quête du pouvoir comme fin en soi et l'emploi de tous les moyens quels qu'ils soient pour y parvenir, s'oppose aux principes bouddhiques de l'éthique. Dans le même temps la philosophie politique du Bouddha se développe en partie hors de la critique du réalisme politique machiavélique de la doctrine des Arthasastras. » p.471

 

            Les textes bouddhiques acceptent une grande partie de la sagesse des Arthasastras dont le besoin d'une administration efficace et d'une vigilance exigée du roi ou de l'Etat sur les politiques intérieure et extérieure. Quant à la question de pouvoir, il y a une différence essentielle : selon l’Arthasastra, les valeurs morales sont soutiens du pouvoir, et selon les textes bouddhiques,   le pouvoir est ultimement soutien de droiture dans le gouvernement (p.472). Pour illustrer ce point, Pr. Jayathilleke cite ce qui suit de Mahavastu, texte bouddhique Mahayana :

 

 Bala Cakram hi nisraya Dharma cakram pravartate :

 

“La roue du pouvoir tourne dépendante de la roue de la justice. »
L'un des plus grands gouverneurs dans le monde, Açoka, au début de son règne a aussi suivi l’Arthasastra ce qui l’a entraîné à mener une politique étrangère agressive (dig-vijaya). Mais il changea sa politique pour celle du dharma-vijaya (conquête pour la droiture). Le Pr. Jayathilleke a donné un certain nombre d'exemples où les gouverneurs, dans les textes bouddhiques sont avertis de renoncer à leur politique agressive et de développer amitié et coopération dans la sphère des affaires extérieures (ou étrangères) (p.473).
C’est un point généralement accepté, à savoir tout Etat utilise la loi internationale et la politique internationale à des fins égoïstes. Bien que le Pr. Jayathilleke n’ait pas en détail différencié, entre politiques intérieures et politique étrangère d'un Etat, il n'a pas manqué de montrer aussi bien la politique intérieure que celle étrangère, doivent être fondées sur le Dharma. Nous ne pouvons espérer trouver un Etat qui mène une politique étrangère basée sur le Dharma au moment où il poursuit une politique intérieure qui en est dépourvue.
Dans la politique internationale, un Etat c’est l'unité la plus importante. Cependant, selon la philosophie politique dans le bouddhisme, un Etat doit posséder les qualités suivantes :

 

1) Un gouvernement élu par le peuple ; le gouverneur va être serviteur des citoyens (gama desa) (p512). La population a le droit de chasser du pouvoir un régime corrompu par des moyens non violents(p.528).

 

2) Un système légal en mesure de faire respecter justice et équité (p 488) qui renforce l'égalité entre les êtres humains (p 515-517).( Le Pr. Jayathilleke renvoie aux arguments avancés par le Bouddha pour l'établissement de la vérité de l'égalité entre eux les êtres humains.)

 

3) Une constitution basée sur la droiture où les droits de l'homme sont respectés (p 558).

 

4) Un plan (programme) établi comme suit :
un système d'assurance qui est en mesure de protéger les personnes et propriétés  
 l'élimination des crimes
c) la distribution de la richesse du pays, et assurance de l'emploi,
d) un mécanisme pour  établir  la politique correcte (p 540-541)

 

5) une politique étrangère fondée sur les principes suivants :
promotion de l'amitié ;
non-agression  ;
c) promotion du bien-être pour l'ensemble de la communauté humaine   (p 557)

 

6) les administrateurs possédant les qualités suivantes : a) altruisme (parichhaga) ; b) rectitude (ajjava) ; c) miséricorde (akkhoda) ; d) sagesse politique (pragnabala) (p530)
Une théorie bouddhique de la politique internationale ne peut être significative que si les Etats rendent effectives les idées susmentionnées. Il y a trois manières de les rendre comme telles :
l'existence d'Etats qui possèdent les 6 caractères sus-cités.

 

L'émergence d'un gouverneur du monde (chakkvatthi raja) qui, lorsqu'il établit un Etat, essuie une politique étrangère de Dhamma-vijaya, amène le monde entier sous son gouvernement, et gouverne suivant les Dix Règles de droiture (dasaraja-dhamma) (p538)
établissement d'un gouvernement du monde sans roi (arajakaca) qui fonctionne selon une constitution basée sur le Dhamma (p 539)
Je fais remarquer qu'il serait très utile si le Pr. Jayathilleke comparait le concept de « arajakacakka » avec le système de l'Organisation des Nations Unies. L’O.N.U. est dans un sens un gouvernement du monde sans raja ou roi. Comme la troisième forme d'un Etat universel (chakkavatthi rajaya) l’O.N.U. dépend de sa charte ou constitution. C'est ce document qui est la force vitale de l'O.N.U.. La charte de celle-ci a deux objectifs initiaux (voir le préambule de la charte des Nations Unies)

 

1) établir la paix dans le monde
 
2) assurer le bien-être de la communauté humaine

 

En comparant et contrastant le concept de chakkavatthi rajaya et la charte des Nations Unies, l'on remarque que l'idée de la charte des Nations Unies est très proche de la théorie bouddhique de la politique internationale. En bref, c'est une vue systématique d'une méthode pour laquelle le progrès aussi bien matériel qu’ intellectuel de l'humanité, est acquis.

 

      Le système bouddhique de l'Etat-le chakkavatthi rajaya a comme but la prospérité et le bonheur du monde entier. Dans ce sens, une politique bien promulguée sur les deux plans intérieur et  extérieur, s’avère essentielle. La politique intérieure et extérieure d'un Etat devrait réaliser, selon le Bouddha, les quatre objectifs suivants (p 494)

 

1-Atta    Sukha (sécurité économique)
2-Bhoga Sukkha  (abondance de nourriture et d'autres matières essentielles)
3- anana Sukkha (libération de toute dette)
4-Anavajja Sukkha (mœurs non blâmables)

 

Pour la théorie bouddhique de politique internationale, l'importance de la stabilité économique est soulignée par le Bouddha. Le Seigneur, dans nombre de ses discours, révèle l’importance de la juste répartition des richesses. comme une étape nécessaire au bien-être de bonheur de l'humanité. Pour illustrer cela, le Pr. Jayathilleke donne le passage suivant extrait du Digha-Nikaya (p 536) :

 

« …Du fait de l'absence de fourniture de biens pour les défavorisés, la pauvreté s'accroît ; l'accroissement de la pauvreté entraîne vol, violence, meurtre, mensonge, mauvaise conduite sexuelle, fausse opinion sur la vie, manque de respect à l'égard des autorités. »

 

      Sous le système du gouvernement du monde ou dans l'établissement d'Etats qui suivent les principes bouddhiques, le droit international a un rôle important à jouer. Le droit international moderne s’avère inégal pour accomplir la tâche de résoudre les problèmes du monde. De plus, il observe que les nations nouvelles trouvent difficile de s'adapter totalement au droit international des nations occidentales, tout en s'opposant ni ne rejetant le besoin du droit international qui consiste en une force qui relie toutes les nations avec le bien et le bonheur. » (p 561)
Le Pr. Jayathilleke s'accorde avec J.H.G.Syatauw qui, en 1961 fit remarquer à l'académie de La Haye, que les nations commencent à réclamer le droit de choisir les droits qui leur conviennent et refuser ce qui est nocif et inutile. Le droit international ne doit pas être utilisé à des fins égoïstes et mesquines de nationalisme, mais doit être amélioré et dirigé dans le sens de l'établissement du bien-être de l'ensemble de l'humanité.

 

En formulant et rendant effectif le droit international, les juristes devraient se tourner vers les textes bouddhiques de la discipline (Vinaya Pitaka) qui les inspirent et guident. Le système bouddhique de la jurisprudence est de nature internationale, et s'appuie sur les droits fondamentaux de l'homme et sur la théorie de la démocratie.(p534)

 

            Le Pr. Jayathilleke ne discute pas spécialement des deux théories  acceptées de la base du droit international. Mais ces références aux Vinaya Pitaka démontrent que le Bouddha, en promulguant les règles de la communauté de la sangha Internationale (l'ordre religieux monastique bouddhiste) a parfaitement tenu compte de ces deux théories à savoir : la théorie des « droits fondamentaux » et la « théorie du consentement ».

 

            Les lois promulguées par le Bouddha étaient utiles et pragmatiques. Il a fait le sommaire suivant de 10 objectifs : 1) le bien-être de la communauté 2) la paix de la communauté 3) ne pas donner libre cours aux scélérats 4) la tranquillité de ceux qui sont de bonne conduite 5) réduire les mauvaises conduites dans le présent 6)empêcher tout mauvais  comportement de se produire 7) permettre à ce qui n’ont pas foi dans le Dhamma, de l’avoir 8) renforcer la foi de ceux qui l'éprouvent 9) faire durer longtemps la bonne doctrine (sad-dhamma), 10) de promouvoir la discipline (p451)

 

            A moins que l'on donne son consentement exprimé (et non tacite), on ne peut devenir membre de la communauté du Sangha. Lorsque l'on adhère à la communauté, les règles sont à observer strictement, qui émanent des disciplines (Vinaya). Dans le cas de violation des règles, le coupable sera traité par une cour de moines anciens, de manière démocratique, et tout effort sera fait pour combattre ceux, qui se comportent mal (si leur culpabilité ne fait pas de doute), qui ont commis des actes contraires aux règles du Vinaya.

 

            Suivant le statut de la Cour  Internationale de Justice, les principes du Droit reconnus par les nations civilisées, s’appliquent pour traiter des cas internationaux (article 38 du statut). Ils pourraient être plus fructueux si le Pr. Jayathilleke avait porté son attention sur les principes de Droit acceptés par les juristes et les experts en droit international. Il est vrai qu'il y a absence de principe de Droit par tous les juristes et les experts unanimement. Cependant, plusieurs juristes internationaux d'Occident admettent les principes suivants : 1) principe de justice 2) principe d'équité 3) principe de convenance 4) principe de raison 5) principe de droits.

 

Selon l'idéologie communiste, les experts en droit en Russie acceptent les principes suivants :1) principe de souveraineté 2) non-intervention 3) inviolabilité territoriale 4) égalité d’Etats 5) non- agression 6) auto-détermination 7) coexistence pacifique.

 

La Commission de Droit International mise en place par l'Assemblée Générale des Nations-Unies, accepte ce qui suit :1) indépendance 2) égalité 3) juridictions sur leur territoire 4) auto-défense 5) règlement pacifique des différents 6) Droits de l'homme

 

A ce propos, je désire faire remarquer que, fondamentalement, il n'y a pas de contradiction entre les principes exposés ci-dessus et la philosophie politique du bouddhisme. Il est admis qu'il n'y avait pas de loi codifiée pour les nations en usage dans les Etats bouddhistes d'Asie. Cependant, toujours est-il que les gouverneurs de ces Etats ont géré les affaires extérieures selon les principes tels que justice, équité et droit (p 457 ; 558).

 

Le principe de convenance mérite une considération particulière en promulguant et rendant effectives les règles du Vinaya par le Bouddha (p 451). Dans le but d'engager le droit international de la sauvegarde de la justice, il convient il y ait un ensemble de principes admis unanimement par chaque État dans le monde.

 

Dans son traité, le Pr. Jayathilleke renvoie au principe de justice, équité, droits de l’homme et égalité telle qu'ils sont admis par la philosophie politique du bouddhisme. Selon moi, le principe du bien commun (bahujana sukya) aussi doit être inclus comme principe de Droit. L'idée du bien commun aux êtres humains a été soulevé par le Pr. Jayathilleke plusieurs fois dans son traité. L'acceptation de ce principe bouddhique comme principe de droit international entraînerait une perspective étroite du droit international moderne ainsi qu’égocentrique.
Je pense que Pr. Jayathilleke était en mesure d'exposer devant les juristes de La Haye la théorie bouddhique de politique internationale, et de montrer que les principes de droit international ne sont pas nouveaux pour la philosophie politique bouddhique. À ce propos, je désire faire remarquer que les origines de la démocratie et du droit international sont traçables non par l'Occident, mais par l’Orient (l’Asie) là où le bouddhisme a laissé un grand impact.

 

N°14
Les qualités suprêmes du Thatagata  (extrait et traduit du Livre La beauté du Lotus blanc)
Le grand maître spirituel, le Thatagata (Araham Samma Sambudho) a averti ses disciples d'évoquer les qualités spirituelles suprêmes du Thatagata dans le but de développer la confiance en leur maître. Thatagata veut dire : « Celui qui a gagné par la vérité. » C'est un nom alternatif du Bouddha.

 

Clarifiant le mot « Thatagata », le Bouddha explique : « Ô moines, le monde de la souffrance est totalement compris et la libération du monde de la souffrance est à portée de la main. L'apparition du monde de la souffrance est comprise, et l'apparition du nom de la souffrance est abandonnée. La cessation du monde de la souffrance est comprise, et la voie (qui y mène) est empruntée jusqu'à son terme. Celui qui a réalisé cela est appelé Thatagata. Ô moines, dans la totalité du monde, le monde des dévas et des humains, le Thatagata est le conquérant, non- conquis, qui voit tout, omniscient. Voilà pourquoi il se nomme Thatagata.

 

Les qualités spirituelles suprêmes ou vertus du Thatagata se divisent en neuf catégories : Araham—Samma sambudho—Vijjacarana Sampanno—Sugato—Lokavidu—Anuttaro Purisadamma Sarathi—Sattha Devamanussanam—Budho—Bhagava
Ceux qui se disent être bouddhistes doivent être vigilants sur cette revendication. En tant que bouddhistes, ils choisissent le Bouddha comme leur maître spirituel et espèrent de lui bénédiction, bien-être et bonheur pour eux. Les adeptes de toutes les autres religions, ceux qui lèvent leur foi dans un pouvoir divin tout-puissant, ou dans un message d'un Dieu omnipotent, croient qu'en faisant cela, non seulement ils recevront la bénédiction et la protection de ce pouvoir divin, mais aussi obtiendront succès et prospérité selon la volonté divine. Dans l'enseignement de Bouddha, le concept de « pouvoir divin tout-puissant qui contrôle la destinée » est rejeté. À la place, le Bouddha enseigne la doctrine de la genèse conditionnée c'est-à-dire l'apparition du phénomène en lien avec des causes, ou : la théorie de cause à effet.

 

Le concept de création a vu le jour comme résultat de l'ignorance ou sujet de l'apparition du monde et des êtres. Selon la doctrine bouddhique, la genèse ne peut être perçue par des arguments ou par l'établissement de concepts philosophiques qui relèvent du monde.
Le monde des phénomènes a lieu en un temps illimité. S’il y a eu création, celle-ci aurait eu lieu à un certain moment. Et, le pouvoir divin qui aurait créé le monde et les êtres matériels, devrait être existant avant le monde des phénomènes. Donc, le créateur devrait exister en dehors des sphères du « monde  et du temps ». Cependant, pour connaître au sujet de quelque chose extérieur au royaume « du monde et du temps », l'on doit posséder une connaissance supramondaine que l'on ne peut réaliser que par un développement intensif du mental.
Les causes premières du mal à savoir : la cupidité, la haine et l’illusion, polluent le mental par ce qu’elles génèrent: malice, colère, jalousie, ladrerie ou avarice, hypocrisie, obstination, tromperie, arrogance, vanité et étourderie. Avec un mental souillé et pollué, il est impossible de pénétrer dans le monde pour réaliser ce qui est au-delà du monde. Bien qu'il ait tenté muni de dix  types de pouvoir spirituel du mental hautement manifestés, le Tathagata a déclaré qu'il n'était pas créateur tout-puissant, bien connaisseur de tout ou omniscient, et rejetait le concept prévalant de Dieu omniprésent.

 

Les 10 pouvoirs spirituels de Bouddha
Le Bouddha a énoncé au vénérable Sariputta les 10 pouvoirs spirituels qui l’ont rendu apte à se considérer comme Tathagata. Cette proclamation est exposée dans le Mahasinda Sutta (discours du rugissement du lion) comme suit :
Là, le Thatagata comprend tel qu'il est, ce qui est possible, et tel qui est ce qui est impossible. Et ce qu’est le pouvoir que possède un Thatagata, grâce auquel il revendique le statut de berger-guide, rugit tel un lion dans l'assemblée et fait tourner la Roue de Brahma.
En outre, le Thatagata comprend à leur juste titre les résultats des actions accomplies passées, futures et présentes avec les possibilités et les causes. Cela aussi est le pouvoir du Thatagata  en fonction duquel il revendique le statut de berger-guide, rugit tel un lion dans les assemblées, et fait tourner la Roue de Brahma.
Le Thatagata comprend à leur juste titre les voies qui mènent à toutes les destinations. Voilà un autre pouvoir du Thatagata …qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Le Thatagata comprend à son juste titre le monde avec ses nombreux et différents éléments. Cela aussi est un pouvoir du Thatagata …qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Le Thatagata comprend à juste titre la raison pour laquelle les êtres ont différentes tendances. Cela aussi est un pouvoir du Thatagata …qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Le Thatagata comprend à juste titre la disposition des facultés des autres êtres et personnes. Cela aussi est un pouvoir du Thatagata …qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Le Thatagata comprend à juste titre la souillure, le nettoiement et l'accession au niveau des jhanas, libérations, les concentrations et les réalisations. Cela aussi est un pouvoir du Thatagata …qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Le Thatagata se rappelle ses nombreuses vies antérieures, à savoir une naissance, deux naissances, trois naissances, quatre naissances, cinq naissances, dix naissances, vingt naissances, trente  naissances, 40 naissances, 50 naissances, 100 naissances, , 1000 naissances, 100 000 naissances, de nombreux éons de la contraction-du-monde, de nombreux éons de l'expansion-du-monde, de nombreux éons de-la-contraction et l'expansion-du-monde. « Là je portais une identité qui me liait à tel clan, j'avais telle apparence, ainsi était ma nourriture, ainsi mon expérience du plaisir et de la douleur, et le terme de ma vie ; et ma mort. J'ai réapparu quelque part ; là aussi, j'ai reçu tel nom et appartenance à tel clan, là telle était mon apparence, ainsi était ma nourriture, mon expérience du plaisir et de la douleur, le terme de ma vie et ma mort. J'ai réapparu ici. Et, avec leurs aspects et particularités, j'ai la mémoire de mes nombreuses vies. Cela aussi est le pouvoir du Thatagata… qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

Avec le divin qui est purifié et qui surpasse l'homme, le Thatagata voit les choses mourir et réapparaître inférieur et supérieur, beau et laid, fortuné et infortuné. Il comprend le devenir des êtres selon leurs actions, de la sorte : «Ces êtres riches qui s'étaient mal comportés sur les plans : du corps, de la parole et de l'esprit, offensant les nobles ; de vue erronée, d'actions perverses, à la dissolution du corps, après la mort ils réapparaissent  dans un état de dépravation, dans une mauvaise destination, en perdition, et même en enfer. Mais ces autres êtres riches qui s'étaient bien comportés sur les plans : du corps, de la parole et de l'esprit, non offensant les nobles ; de vue correcte, d'actions également correctes, à la dissolution du corps après la mort, ils réapparaissent dans de bonnes conditions et même dans un monde paradisiaque. En effet, avec l’oeil divin qui est purifié et qui surpasse l'homme, ils voient les êtres mourir et réapparaître, inférieurs et supérieurs, beaux et laids, fortunés et infortunés, et il comprend le devenir des êtres suivant leurs actions. Cela aussi est le pouvoir du Thatagata… qui fait tourner la Roue de Brahma.

 

En réalisant par lui-même avec une connaissance directe, le Thatagata entre et réside dans la délivrance de l'esprit et dans celle par la sagesse non corrompue par la destruction que causent les corruptions. Cela aussi est le pouvoir du Thatagata… qui fait tourner la Roue de Brahma.
Le Bouddha a atteint l'ultime pureté de l'esprit. Il a éradiqué les racines du mal sans laisser une trace de ses tendances, et acquis la connaissance omnisciente et insurpassable qui lui a permis d'affirmer sans détour le processus naturel de l'apparition liée à une condition, voire la création du monde et des entités matérielles.
Un esprit pollué et obscurci par les tendances malsaines est inapte à acquérir quelques pouvoirs spirituels. C'est une vérité évidente que, d'entre tous les maîtres spirituels du monde, seul le maître Samma Sambuddha a proclamé être parvenu à extirper les racines du mal de l'esprit sans laisser de résidus. Mettre un terme définitif aux causes de la racine à savoir : la concupiscence, la haine et l'illusion s'appelle « Nibbana » (en sanskrit nirvana) dans le bouddhisme.

 

Bhagava-qui chasse tout mal

 

Le Bouddha qui élimine tout mal, a enseigné à ses disciples la manière de le faire. C'est pourquoi il a reçu le qualificatif de Bhagava. Le terme de Bhagava n'est pas simplement un épithète parental ou personnel mais il représente la qualité spirituelle suprême du Bouddha indépassable. Il dérive de trois syllabes : bha+ga+va. La première désigne le devenir ou l'existence, la deuxième : traverser, et la troisième : laisser. À traduire : celui qui a rejeté les causes du devenir, à savoir :la concupiscence, la haine et l'ignorance, c'est-à-dire : celui qui a dissipé «  le mal ».

 

Fort des dix pouvoirs du Thatagata, le Bouddha a acquis la qualité spirituelle particulière suprême d'un Bhagava. Il est devenu le seul être dans le monde doté des neuf qualités spirituelles suprêmes :Araham, Samma Sambudho, Vijjacarana Sampanno, Sugato, Lokavidu, Anuttaro Purisadhamma Sarathi, Satta Deva Manussanam, Budho, Bhagava. Et du fait de ces qualités spirituelles insurpassables, le Bouddha pouvait pénétrer non seulement dans le monde avec toutes les déités et les hommes de celui-ci, mais aussi dans les mondes au-delà de l'espace et du temps car la Genèse qui dépend de conditions n'est pas entravée par de tels phénomènes.

 

Dans le Rohitassa Sutta, le Bouddha a mis l'accent sur le concept suivant : «  A une certaine occasion, le Bienheureux résidait près de Savatthi dans le bosquet de Jeta au parc d’Anatapindika. À la fin de la nuit, il s'est adressé aux moines en ces termes :Ô moines, cette nuit Rohitassa des dévas, vers la fin de la nuit est venu me visiter ; son éclat a illum
iné tout le bosquet de Jeta d'une splendeur sans égale ; il m’a rendu hommage , puis s’est mis à côté, puis moi adressé ses paroles :
« Seigneur, nous est-il possible si nous connaissions, voyions, atteignions la fin du monde où il n'y aura plus de naissance, vieillesse et mort, ni non plus de chute (à partir d'une existence) ou élévation (vers une autre) ? »

 

…J’ai dit ceci à Rohitana des dévas : « Votre Révérence, là où il n'y a plus de naissance, vieillesse et mort, ni chute ni élévation à partir d'une existence vers une autre, je déclare que la fin du monde ce n'est pas par un départ qu'on peut la connaître, voir ou atteindre. »

 

« C’est vraiment merveilleux, Seigneur, cette parole est bien pertinente, Vénérable :Là où il n'y aura plus de naissance, vieillesse et mort… et que la fin du monde ce n'est pas par un départ qu'on peut la connaître, voir ou atteindre. » Auparavant, Seigneur, j’étais ermite au nom de Rohitassa, fils de Bhoja ; l'un de mes pouvoirs mystiques me permettait de voler dans le ciel. Ma rapidité, Seigneur, comme si, par exemple, un puissant archer, habile dans le tir à l'arc, expérimenté pouvait avec une flèche fine tirer à travers l'ombrage d'un palmier. Voilà ce qui était ma vitesse. Mon pas enjambait la distance entre l'océan de l’Est et celui de l'Ouest. Muni, Seigneur, de tels pouvoirs, je désirais ceci : atteindre la fin du monde par un départ. Mais, Seigneur, sans parler du (temps passé à) me nourrir, voir, manger, sentir et accomplir mes besoins ; sans parler de la lutte contre le sommeil et la fatigue, bien que chaque vie en moi compte cent ans, bien que j'ai voyagé cent ans, je n'ai pas atteint la fin du monde, mais décédé avant. C'est merveilleux en fait, Seigneur, prodigieux ; que c'était pertinent ce qu'a dit le Bienheureux : « Votre Révérence, là où il n'y a plus naissance, vieillesse et mort, plus de chute (d'une existence vers l'autre) je déclare que la fin du monde ce n'est pas par le départ qu'on peut la connaître, voir ou atteindre. » « Mais, Votre Révérence, je ne déclare pas qu'il y a cessation du mal sans atteindre la fin du monde. Non, Votre Révérence, ce corps de la taille d'une brasse avec ses perceptions et pensées, je proclame l'existence du monde, ainsi que l'origine du monde et la fin du monde.

 

            Ce n'est pas par un départ que l'on atteint la fin du monde.
            Il n'y a pas de fin à la souffrance de l'homme
            à moins qu'il atteigne la fin du monde.
            Que l'homme devienne connaisseur du monde, sage          
            ou qu'il tente la fin du monde.
            Qu'il mène la vie divine.
            C'est en devenant calme que l'on connaît la fin du monde
            et sans espérer accéder un monde quelconque.
           
          La connaissance du Thatagata de ce monde matériel et du monde qui le suit, est contenue dans les neuf qualités suprêmes du Bouddha. Quand on se rappelle ces qualités avec leurs caractéristiques propres, on acquiert confiance dans le Bouddha, et on est poussé à suivre ses pas avec un esprit concentré qui mène à la réalisation du monde transitoire et à l'affranchissement loin du monde par l'éradication de la racine qui cause le mal.
Quand nous traitons des qualités spirituelles ou vertus du Bouddha, nous serons informés que le Thatagata est Bhagava «  qui dissipe le mal ». En procédant à chacune de ces qualités spirituelles, nous répétons

 

            Itipi so Bhagava, Arahan :
            C'est pour cette raison là, celui qui dissipe le mal est Arahant
            Itipi so Bhagava Samma Sambudho :
            c'est pour cette raison là, celui qui dissipe le mal est Samma Sambudha…
 

 

 

 

 

***