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#6 - La dette du monde au Bouddha

 

 

Le Bouddha à propos du soi-disant Dieu créateur

 

 

« Inconcevable est le commencement, Ô disciples, de cette errance. Le point originel de cette course, de cette errance, des êtres, masqué par l’ignorance, lié par le désir impérieux, n’est point révélé. »
-Samyutta Nikâya.
L’équivalent Pâli pour le Dieu créateur des autres religions est soit Issara (Sanskrit-Ishvara) ou bien Brahmâ.
À plusieurs occasions le Bouddha nia l’existence d’une âme permanente (attâ). Concernant le fait qu’il nia l’existence d’un Dieu créateur, il n’existe que quelques références à ce sujet. Le Bouddha n’accepta jamais l’existence d’un Créateur que ce soit en tant que force ou en tant qu’être.
Malgré le fait que le Bouddha n’éleva point de divinité surnaturelle au-dessus de l’homme, quelques érudits affirment que le Bouddha était caractéristiquement silencieux sur cette question importante et controversée. Les citations suivantes indiqueront clairement le point de vue du Bouddha au sujet du concept d’un Dieu créateur.
Dans le Anguttara Nikâya le Bouddha parle de trois vues divergentes qui prévalaient à son époque. Une d’entre elles était : « Quels que soient la sensation neutre, le bonheur ou la douleur que cette personne expérimente, tout cela est dû à la création d’une déité suprême. » *1
D’après cette vue, nous sommes ce que le Créateur souhaitait que nous soyons. Nos destinées demeurent entièrement entre ses mains. Notre destinée est prédestinée par lui. Le libre arbitre supposé et accordé à sa création est évidemment faux.
Critiquant cette vue fataliste dans le Devadaha Sutta, le Bouddha dit : « Ainsi donc, en raison de la création d’une déité suprême, les hommes deviendront des meurtriers, des voleurs, des êtres incontinents, des menteurs, des calomniateurs, des bavards proférant des injures, avides, malicieux et aux vues perverses. Ainsi pour ceux qui se confinent à la création d’un Dieu comme la raison essentielle de tout ce qui vit, il n’existe ni désir, ni effort, ni nécessité de produire cet acte ou de s’abstenir de cet acte. *2
Dans le Devadaha Sutta*3 le Bouddha, se référant à la mortification des ascètes nus, remarque : « Si, Ô Bhikkhus, les êtres expérimentent la souffrance et le bonheur en tant que fruit de la création de Dieu, alors certainement ces ascètes nus doivent avoir été créés par un Dieu méchant, car ils souffrent d’une douleur terrible ».
Le Kevaddha Sutta narre une conversation pleine d’humour qui eut lieu entre un Bhikkhu curieux et le supposé créateur.
Un Bhikkhu, désireux de connaître la fin ultime des éléments, approcha Mahâ Brahmâ et le questionna ainsi :
« Où, mon ami, les quatre grands éléments : la terre, l’eau, le feu et l’air-cessent-ils, ne laissant aucune trace derrière eux ? » À ceci, le grand Brahmâ répondit : « Moi-même, frère, je suis Brahmâ, le grand Brahmâ, l’Être suprême, le Sans égal, le Maître, le Victorieux, le Régent, le Père de tous les êtres qui ont vécu et qui vivront. »
Pour la seconde fois, le Bhikkhu répéta sa question, et le grand Brahmâ apporta la même réponse dogmatique.
Quand le Bhikkhu le questionna pour la troisième fois, le grand Brahmâ prit le Bhikkhu par le bras, l’amena sur le côté, et fit la remarque franche suivante :
« Ô frère, ces dieux qui constituent ma suite croient en la chose suivante : Brahmâ voit toutes choses, connaît toutes choses, a pénétré toutes choses. Je ne sais pas, Ô frère, où ces quatre grands éléments : terre, eau, feu et air cessent, ne laissant rien derrière eux. Par conséquent ce fut un méfait et un crime, Ô frère, que tu quittas l’Éveillé, et te rendit ailleurs en quête d’une réponse à cette question. Reviens sur tes pas, Ô frère, et t’étant rapproché de l’Éveillé, pose-lui cette question, et aie confiance en ce que l’Éveillé t’expliquera. »
Revenant à l’origine de Mahâ Brahmâ, le soi-disant Dieu créateur, le Bouddha commente dans le Pâtika Sutta : *4
« À propos de ceci, Ô disciples, cet être qui naquit le premier (dans une nouvelle évolution du monde) pense de la manière suivante : « Je suis Brahmâ, le grand Brahmâ, le Vainqueur, celui qui voit toutes choses, le Broyeur, le Seigneur, le Faiseur, le Créateur, le Maître, l’Adjudicateur, le Maître de lui-même, le Père de tout ce qui est et de tout ce qui sera. Par moi tous ces êtres sont créés. Et pourquoi en est-il ainsi ? A une époque de jadis, je pensai : Puissent d’autres êtres atteindre aussi cet état de l’être ! Telle fut l’aspiration de mon esprit, et donc ces êtres vinrent à l’existence. »
« Et ces êtres eux-mêmes, qui apparurent après lui, pensèrent aussi ainsi : Cet être digne doit être Brahmâ, le grand Brahmâ, le Vainqueur, celui qui voit toutes choses, le Broyeur, le Seigneur, le Faiseur, le Créateur, le Maître, l’Adjudicateur, le Maître de moi-même, le Père de tout ce qui est et de tout ce qui sera. »
Sur ce, Ô disciples, cet être qui apparut le premier, eut une vie plus longue, de plus belle apparence, et plus puissant, mais ceux qui apparurent après lui eurent une vie plus courte, ils furent moins beaux et moins puissants. Et il se peut très bien, Ô disciples, que quelque autre être, décédant de cet état, se manifesterait dans cette vie terrestre et abandonnerait la vie de maître de maison pour la vie d’errance sans domicile. Et ayant ainsi tout quitté, en raison de son ardeur, son effort, sa dévotion, sa sincérité, son intellection parfaite, il réalise un tel état de concentration intense qu’avec un esprit très aiguisé il se souvient de ses demeures antérieures, mais non de ce qui se produisit antérieurement. Ainsi il dit : « Ce Brahmâ digne de vénération, le Vainqueur, celui qui voit toutes choses, le Broyeur, le Seigneur, le Faiseur, le Créateur, le Maître, l’Adjudicateur, le Maître de moi-même, le Père de tout ce qui est et de tout ce qui sera, celui par qui nous avons été créés, il est permanent, constant, éternel, non-changeant, et il demeurera ainsi pour toujours et à jamais. Mais nous qui avons été créés par ce Brahmâ, nous sommes venus ici en tant qu’êtres impermanents, transitoires, instables, ayant une vie courte, destinés à trépasser. »
« Ainsi fut scellé le commencement de toutes choses que vous Messieurs, vous déclarez comme étant votre doctrine traditionnelle, selon laquelle ce commencement a été provoqué par un Seigneur suprême, par Brahmâ. »
Dans le Bhûridatta Jâtaka*5 (N°543), le Bodhisatta s’interroge au sujet de la justice divine supposée du créateur comme suit : -
« Celui qui a des yeux peut contempler la vision écœurante,
pourquoi Brahmâ ne rend-il pas les créatures justes ?
Si son pouvoir étendu ne se confine à aucune limite,
Pourquoi sa main accorde-t-elle si rarement des bénédictions ?
Pourquoi est-ce que toutes ses créatures sont condamnées à souffrir ?
Pourquoi ne leur accorde-t-il pas le bonheur ?
Pourquoi la fraude, les mensonges et l’ignorance prévalent-ils ?
Pourquoi la fausseté triomphe-t-elle, pourquoi la vérité et la justice échouent-elles ?
Je considère que votre Brahmâ est injuste,
Pour avoir créé un monde dans lequel on ne peut prendre refuge. »
Réfutant la théorie selon laquelle toutes choses sont la création d’un être suprême, le Bodhisatta déclare dans le Mâhabodhi Jâtaka (N°528) *6 :
« S’il existe quelque Seigneur tout Puissant qui accorde
A chaque créature la félicité ou le malheur, les bonnes ou mauvaises actions ;
Ce Seigneur est souillé par le péché. L’homme ne fait qu’accomplir sa volonté. »
Notes :
*1 Anguttara Nikâya, I, page 174. Les paroles de ceux dont l’esprit s’accordent à l’unisson, I, p.158.
*2 Majjhima Nikâya, II, 101, p.222.
*3 Dîgha Nikâya, I, 11, p.221
*4 Dîgha Nikâya, III, 24, p.29; Dialogues of the Buddha (Dialogues du Bouddha) III, pp. 26, 27.
*5 Jâtaka Stories (Histoires de Jâtaka), VI, p.110.
*6 Ibid, V, p.122

 

 

Raisons de croire en la renaissance

 
« Je me suis souvenu de mes situations variées lors d’existences antérieures. »

 

-Majjhima Nikâya.
Pourquoi devrions-nous croire en la renaissance ?
Le Bouddha est notre plus haute autorité sur le sujet de la renaissance. La nuit même de son illumination, pendant la première veillée, le Bouddha développa une connaissance de « rétrocognition » qui lui permit de contempler ses vies passées.
« Je me souviens, » déclara-t-il, « de mes diverses situations dans des existences antérieures comme suit : d’abord une vie, ensuite deux vies, puis trois, quatre, cinq, dix, vingt jusqu’à cinquante vies, puis cent, mille, cent milles et ainsi de suite. »
Pendant la deuxième veillée de la nuit, le Bouddha, avec une vision clairvoyante, perçut les êtres comme disparaissant d’un état d’existence et réapparaissant dans un autre. Il contempla « les bas et les nobles, les beaux et les laids, les êtres heureux et les êtres malheureux, évoluant en fonction de leurs actes. »
 
*1
Ce sont les premières paroles prononcées par le Bouddha au sujet de la question de la renaissance. Les références textuelles prouvent de manière concluante que le Bouddha n’a pas emprunté cette vérité crue de la renaissance à une source préexistante, mais qu’il l’exprima d’après sa connaissance personnelle, une connaissance qui était supranormale, développée par ses efforts et qui pouvait être développée par autrui également.
 
*2
Dans son péan de joie, le Bouddha dit :
« J’ai erré pendant de nombreuses naissances, cherchant le bâtisseur de cette maison. Pleine de souffrances en fait est la naissance encore et encore. »
 
*3
Dans le Dhammacakka Sutta, son tout premier discours, le Bouddha, commentant la deuxième noble vérité, déclara : « Cette envie impérieuse même est ce qui conduit aux renaissances. » Le Bouddha conclut ce discours par ces paroles : « Ceci est ma dernière naissance. Il n’y aura plus de renaissance pour moi. »
Le Majjhima Nikâya relate que quand le Bouddha, par compassion envers les êtres, contempla le monde avec sa vision avant qu’il ne décide d’enseigner le Dhamma, il perçut les êtres, qui, habités par la peur, virent le mal et un monde au-delà.
 
*4 
Dans plusieurs discours le Bouddha déclare clairement que les êtres qui ont fait du mal, après la mort, renaissent dans des états de malheur, et les êtres qui ont fait du bien renaissent dans des états de félicité.
En plus des histoires de Jataka très intéressantes, qui traitent des vies antérieures et qui sont d’une certaine importance sur le plan éthique, le Majjhima Nikâya et l’Anguttara Nikâya se réfèrent de façon ponctuelle à quelques-unes des vies passées du Bouddha. 

 

Dans le Ghatîkâra Sutta
 
*5 le Bouddha relate au Vénérable Ânanda qu’il naquit en tant que Jotipâla, à l’époque du Bouddha Kassapa, son prédécesseur immédiat.
 
L’Anâthapindikovâda Sutta
 
*6 décrit une visite nocturne de Anâthapindika au Bouddha, immédiatement après sa renaissance en tant que Deva. Dans le Anguttara Nikâya,
 
*7 le Bouddha fait une allusion à une naissance passée en tant que Pacetana, le réparateur de carrioles. Dans le Samyutta Nikâya le Bouddha cite le nom de quelques Bouddhas qui l’ont précédé.
Une référence directe inhabituelle aux êtres qui ont trépassé apparaît dans le Parinibbâna Sutta.
 
*8 Le Vénérable Ânanda désirait apprendre du Bouddha l’état futur de plusieurs personnes qui étaient mortes dans un certain village. La Bouddha lui décrivit patiemment leurs destinées.
De tels exemples purent être multipliés aisément dans le Tipitaka afin de montrer que le Bouddha exposa la doctrine de la renaissance en tant que vérité vérifiable.
 
*9
Suivant les instructions du Bouddha, ses disciples développèrent aussi cette connaissance de « rétrocognition » et furent aptes à lire, bien que vastes, un nombre limité de leurs vies passées. Le pouvoir du Bouddha dans ce domaine était illimité.
Certains Rishis indiens, aussi, avant l’avènement du Bouddha, se distinguèrent par de tels pouvoirs supranormaux tels que la clairvoyance, la télépathie, la télesthésie, et ainsi de suite.

 

Bien que la science ne tienne pas compte de ces facultés supranormales, d’après le Bouddhisme, les hommes qui ont une concentration mentale très développée cultivent ces pouvoirs psychiques et peuvent lire leur passé de la même manière que quelqu’un pourrait se remémorer un incident passé dans cette vie présente. Avec leur aide, indépendamment des cinq sens, une communication de la pensée et la perception directe d’autres mondes sont rendues possibles.
Quelques personnes extraordinaires, spécialement lors de leur enfance, développent spontanément, d’après les lois de l’association, la mémoire de leurs vies passées et se remémorent des fragments de leurs naissances antérieures.
 
*10 « Pythagore est censé s’être souvenu distinctement d’un bouclier dans un temple grec qui y avait été transporté par ses soins lors d’une précédente incarnation durant le siège de Troie.
 
*11 En quelque sorte ces enfants extraordinaires perdent cette mémoire ultérieurement, comme dans le cas de nombreux enfants prodiges.
Des expériences faites par des médiums modernes dévoués, les phénomènes d’apparition de spectres, les communications avec des esprits, des personnalités multiples et suppléantes ont projeté quelque lumière sur ce problème de la renaissance.
Les psaumes des frères moines (Theragâthâ) relatent de façon intéressante l’histoire d’un Brahmane se nomm
ant Vangîsa, « qui acquit son renom en tapotant sur des crânes humains avec ses ongles et en découvrant par là même où leurs occupants antérieurs renaquirent. »

 

Certaines personnes à certaines époques exprimèrent diverses personnalités au cours de leurs vies particulières. Le professeur James cite des cas remarquables dans ses « Principes de la psychologie » (« Principles of Psychology » (Référez-vous à « Human Personality and its survival of bodily Death », (« La personnalité humaine et sa survie lors de la mort physique »)). Le Visuddhimagga mentionne un incident intéressant d’un deva qui entra dans le corps d’un homme laïc. (Référez-vous au « The Path of Purity », (« Le sentier de la Pureté ») I, p.48).
L’auteur lui-même a rencontré des personnes qui furent employées comme des médiums par des êtres invisibles afin que ces derniers fassent part de leurs pensées, et d’autres qui étaient possédées par des esprits mauvais. Quand ils sont habités de ces états hypnotiques, ils parlent et font des choses dont ils sont normalement totalement ignorants et dont ils ne peuvent se souvenir ensuite.
Dans ces états hypnotiques, certains peuvent relater des expériences de leurs vies passées, tandis que quelques autres, tels que Edgar Cayce d’Amérique, furent capables non seulement de lire les vies passées d’autrui, mais aussi de guérir les maladies.
 
*12
Le phénomène de double personnalité peut être expliqué aussi bien en tant que réminiscence d’expériences personnelles passées, qu’en tant que « possession par un esprit invisible. » La première explication apparaît plus raisonnable, mais la seconde ne peut être totalement rejetée.
Souvent nous rencontrons des personnes que nous n’avons pas rencontrées précédemment, mais avec qui, nous le ressentons instinctivement, nous sommes familiers. Souvent nous visitons des lieux et nous nous sentons instinctivement impressionnés comme si nous étions très familiers avec cet environnement.

 

Ce furent de telles expériences qui conduisirent Sir Walter Scott à concocter un sens de la métempsychose. Son biographe Lockhart cite, dans sa « Vie de Scott » le passage suivant extrait du journal de bord de Scott le 17 février 1828 :
« Je ne peux, j’en suis sur, dire si cela mérite d’être noté, le fait que hier au moment du diner, je fus étrangement habité par ce que j’appelle le sens de la préexistence, une idée confuse que rien de ce qui se dit ne le fut pour la première fois, que les mêmes sujets avaient déjà été discutés et que les personnes avaient exprimé les mêmes opinions. La sensation fut si forte au point de ressembler à un mirage dans le désert ou à un délire à bord d’un navire. »

 

« Bulwer Lytton décrit ces expériences mystérieuses comme cette forme étrange de mémoire spirituelle et intérieure qui nous rappellent souvent des lieux et des personnes que nous n’avons pas encore vus dans cette vie, et que les platoniciens considèreraient comme étant la conscience d’une vie antérieure non étouffée et qui lutte. » (H.M. Kitchener, « The Theory of Reincarnation », « La théorie de la réincarnation » p.7)

 

L’écrivain a aussi rencontré quelques personnes qui se souviennent de fragments de leurs naissances passées et aussi un docteur distingué en Europe qui hypnotise les gens et les aide à décrire quelques-unes de leurs vies passées.
Le commentaire sur le Dhammapada relate l’histoire d’un époux et d’une épouse qui, voyant le Bouddha, tombèrent à ses pieds et le saluèrent, disant, « Cher fils, n’est-ce pas le devoir des fils de prendre soin de leur mère et de leur père quand ces derniers sont devenus vieux ? Comment se fait-il que tu ne te sois pas montré à nous pendant si longtemps ? C’est la première fois que nous te voyons (dans cette vie !). »
Le Bouddha attribua cette explosion soudaine d’amour parental au fait qu’ils avaient été plusieurs fois ses parents au cours de vies antérieures et il fit la remarque suivante :
« En raisons d’anciennes associations ou d’un avantage présent, ce vieil amour apparait brusquement à nouveau, tel le lotus dans de l’eau ».
 
*13
Dans ce monde apparaissent des personnalités grandement développées et des êtres parfaits tels que le Bouddha. Pouvaient-elles évoluer de façon soudaine ? Pouvaient-elles être les produits d’une seule existence ? Comment devons-nous nous représenter des personnalités telles que Confucius, Pânini, Buddhaghosa, Homère et Platon, des génies tels que Kâlidasa, Shakespeare, des enfants prodiges tels que Ramanuja, Pascal, Mozart, Beethoven, etc… ?

 

Pouvaient-ils être si exceptionnels s’ils n’avaient pas mené des vies nobles et vécu des expériences similaires dans le passé ? Est-ce par un pur hasard qu’ils naquirent de ces parents particuliers et qu’ils furent confrontés à ces circonstances favorables ?
Les enfants prodiges, aussi, semblent poser des problèmes aux scientifiques. Quelques médecins adoptent l’opinion selon laquelle les prodiges sont le fruit de glandes anormales, spécialement l’hypophyse, la glande surrénale et la glande pinéale. L’hypertrophie extraordinaire de glandes d’individus particuliers pourrait aussi être due à une cause karmique passée. Mais comment, par simple hypertrophie de glandes, un Christian Heineken put parler quelques heures seulement après sa naissance, répéter des passages de la Bible à l’âge de 1 an, répondre à toutes les questions de géographie à l’âge de 2 ans, parler français et latin à l’âge de 3 ans, et étudier la philosophie à l’âge de 4 ans ; comment John Stuart Mill pouvait-il lire le Grec à l’âge de 3 ans ; comment Macaulay pouvait-il écrire l’histoire du monde à l’âge de 6 ans ; comment William James Sidis, enfant prodige des États-Unis, pouvait-il lire et parler à l’âge de 2 ans, parler Français, Russe, Anglais, Allemand et un peu de Grec et de Latin à l’âge de 8 ans ; comment Charles Bennet de Manchester pouvait-il parler plusieurs langues à l’âge de 3 ans, ce sont des évènements merveilleux incompréhensibles pour les scientifiques.
 
*14
La science ne peut pas expliquer non plus pourquoi des glandes s’hypertrophieraient seulement chez certains et non chez d’autres. Le vrai problème demeure irrésolu.

 

La seule hérédité ne peut expliquer l’existence des enfants prodiges, « autrement leur généalogie la divulguerait, leur postérité, dans un degré plus important qu’eux-mêmes, la démontrerait. »
La théorie de l’hérédité devrait être parachevée par la doctrine du kamma et de la renaissance pour une explication adéquate de ces problèmes déconcertants.

 

Est-il raisonnable de croire que la durée de la vie présente est la seule existence entre deux éternités de bonheur ou de misère ? Les quelques années que nous passons ici, tout au plus cent ans, doivent certainement être une préparation inadéquate pour l’éternité.
Si quelqu’un croit dans le présent et dans un futur, il est logique de croire au passé.
S’il y a une raison de croire que nous avons existé dans le passé, alors certainement il n’y a pas de raison de ne pas croire que nous continuerons à exister après que notre vie présente ait apparemment cessé.
« Nous sommes venus contempler le présent comme l’enfant du passé et comme le parent du futur. » T H. Huxley.
C’est en fait un argument clé en faveur des vies passées et futures, car, comme le dit Addison, dans ce monde, des personnes vertueuses sont très souvent malheureuses et des personnes vicieuses sont prospères. »
Nous sommes nés dans un état créé par nous-mêmes. Si, malgré notre bonté, nous sommes contraints à vivre une vie malheureuse, c’est dû à notre kamma négatif passé. Les actes présents bons et mauvais, toutefois, produiront leurs effets inévitables dès que la toute première occasion se présentera.

 

Un écrivain occidental dit :
« Que nous croyions dans une vie passée ou non, cette théorie constitue la seule hypothèse raisonnable qui comble certains fossés dans la connaissance humaine au sujet de faits de la vie de tous les jours. Notre raison nous dit que cette idée d’une vie passée et du kamma est la seule pouvant expliquer, par exemple, les degrés de différences existant entre des jumeaux, comment des hommes tels que Shakespeare, avec une expérience très limitée, sont capables de représenter, avec une exactitude prodigieuse, les types les plus divers de caractères humains, de scènes, et ainsi de suite, dont ils n’avaient aucune connaissance réelle, pourquoi l’œuvre d’un génie transcende invariablement son expérience, l’existence de la précocité d’un enfant en bas âge, et la grande diversité au niveau des esprits et des morales, du cerveau et de l’apparence physique, des conditions de vie, des circonstances et des environnements, observables de par le monde. »

 

Que le Kamma et la Renaissance expliquent-ils ?

 

Ils expliquent le problème de la souffrance pour lequel nous sommes nous-mêmes responsables.
Ils expliquent l’inégalité du genre humain.
Ils expliquent l’apparition des génies et des enfants prodiges.
Ils expliquent pourquoi des jumeaux identiques, qui sont physiquement similaires, jouissant de privilèges égaux, expriment des caractéristiques totalement différentes, que ce soit mentalement, moralement, au niveau du tempérament et intellectuellement.
Ils expliquent les dissimilitudes parmi des enfants de la même famille, bien que l’hérédité eût pu se concrétiser par des similitudes.
Ils expliquent les capacités innées et extraordinaires de certains hommes.
Ils expliquent les différences morales et intellectuelles entre les parents et les enfants.
Ils expliquent comment les enfants développent spontanément des passions, telles que la cupidité, la colère et la jalousie.
Ils expliquent les attirances et répulsions instinctives dès le premier regard.
Ils expliquent comment en nous-mêmes se trouvent « un dépotoir de mal et une maison de trésors de bien. »
Ils expliquent l’explosion inattendue de la passion chez une personne hautement civilisée, et la soudaine transformation d’un criminel en un saint.
Ils expliquent comment des libertins sont nés de parents saints et comment des enfants saints sont nés de parents libertins.
Ils expliquent comment, dans un sens, nous sommes le fruit de ce que nous étions, nous serons le fruit de ce que nous sommes, et d’un autre point de vue, nous ne sommes pas absolument tels que nous étions, et nous ne serons pas absolument ce que nous sommes.
Ils expliquent les causes de morts prématurées et les changements inattendus dans le domaine de la richesse.
Par-dessus tout ils expliquent l’apparition dans le monde de maîtres spirituels parfaits et omniscients, tels que les Bouddhas, qui possèdent des caractéristiques physiques, mentales et intellectuelles incomparables.  

 

Notes :

 

*1 Majjhima Nikâya, I, 36, Mahâsaccaka Sutta, p.248.
*2 Mais nous ne devrions pas en conclure pour autant que le Bouddha est à l’origine de l’idée de renaissance, qui avait été évidemment propagée à son époque, bien que peut-être pas encore acceptée par tous. On la trouve dans les premières Upanishad aussi.
*3 Dhammapada, v.153
*4 Majjhima Nikâya, I, 26, p.161
*5 Majjhima Nikâya, II, 81, p.45
*6 Ibid, III, 143, p.258.
*7 I, p.111
*8 Dîgha Nikâya, II, 16, p.91
*9 Cp. Mr. J.G. Jennings, “The Vedantic Buddhism of the Buddha” (“Le Bouddhisme védantique du Bouddha)
*10 Le cas de Shanti Devi d’Inde est un exemple frappant. Référez-vous à « The Bosat, vol. xiii, N°2, p.27
*11 William W. Atkinson et E.D. Walter, « Reincarnation and the Law of Kamma” (“Réincarnation et la loi du kamma »)
*12 Référez-vous à « Many mansions » (« De nombreuses demeures ») et « The world within » (« Le monde intérieur ») par Gina Cerminara.
*13 Référez-vous à « Buddhist legends » (« Légendes bouddhiques »), III, p.108.
*14 Ceylon observer (l’observateur de Ceylan), le 21 Novembre 1948.
 
 

 

 

 

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 Samadhi Bouddha Statue - Anuradhapura - Sri Lanka  IV-Ve Siècle